Histoire De Navarre - André Favyn - Euldes le Maire de Challou Sainct Medard (1612)
Histoire de Navarre, contenant l'origine, les vies & conquestes de ses Roys, depuis leur commencement jusques a present, ensemble ce qui c'est passé de plus remarquable durant leurs regnes en France, Espagne, et ailleurs,
par Andre Favyn Parisien advocat en Parlement.
A Paris - Chez Laurent Sonnius, Pierre Mettayer et Pierre Chevallier
1612
Livre dixhuictième
p. 1143
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Avec grande raison fut faicte la recherche des francs Fiefs, & nouveaux acquets, & de ceux qui durant les horribles confusions de la France, de roturiers s'estoient faict Gentilhommes à la foule du Peuple, lequel par ce moyen portoit tout le faix des Tailles & impositions, dont ceux-cy se deschargeoient. Pour mesme subiect ceux de la franchise de Challo sainct Mard furent heurtez, & leur Privileges iugez trop excessifs, cassez & revocquez. Ceste famille de Challo Sainct Mard est fort ancienne, ayant duré en ses franchises & libertez prés de cinq cens ans. Elle à pris la descente d'un nommé Euldes le Maire Chastellain de Challou dict Sainct Mard (c'est à dire Medard) Village assis à une lieuë d'Estampes, Ville Capitale de Beauce, renommée pour son antiquité par Grégoire de Tours, livre neufiesme, chapitre vingtiesme de l'Histoire de France. Cest Euldes le Maire estoit Chambellan, c'est à dire, Vallet de Chambre du Roy Philippes premier du nom, lequel ayant faict voeu de faire le voyage de la Terre Saincte tout armé, en fust desconseillé par les Prélats & Seigneurs de France. En son lieu ledict Euldes le Maire fit ce voyage tout armé : comme on le void depeint au Cabinet du Roy, & en plusieurs autres lieux. Auparavant que de partir ledict Roy Philippes premier se declara Baillistre & garde-Noble dela femme dudict Euldes le Maire, & de ses enfans, en faveur desquels il donna des Privileges, le plus grand et remarquable desquels estoit que les Fiscalins espousants les filles dudict le Maire, & celles qui descendroient d'elles, seroient francs, c'est à dire, Nobles & affranchis de totue servitude. Ainsi les femmes annoblissoient les hommes, comme l'ont dict que font les Demoiselles de Champagne par un Privilege qu'on leur attribue, que ie n'ay iamais leu. Voicy celuy de Philippes premier, lefondement & la source de la franchise de Challo Sainct Mard:Ce privilege dict vulgairement, La Chartre de la Franchise.
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Recherche des Francs Fiefs, & nouveaux acquets
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p. 1144
Donnée au Chasteau d'Estampes, mil quatre vingt et quinze, au mois de Mars.
Noms et seings des principaux officiers de la Coronne apposez aux Chartres dónnées par les Roys. Eules le Maire faict le voyage de Ierusalem, auparavant Godefroy de Bologne. Femmes de la franchise annoblissoiét leurs marys. Ancelot le Maire et ses descendant |
ET QUOD IN TOTA TERRA REGIS NULLLAM CONSUETUDINEM DARENT. Rex autem praecepit famulis suis de Stampus, ut custodirent Cameram suam de Challo, quia Challo debet custodire Stampas, et carum seruandarum curam diligenter habere.
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p. 1145
Challou (on void à la grande vitre du Cheur de l'Eglise dudict Village, dediée à sainct Medard, dicte par abbreviation sainct Mard, les Armes de ce Bourg, asçavoir un Chat, & un Loup, pour les représenter en Rebus de Picardie) Que cette bourgade de Challo estoit iadis une chambre, c'est à dire, une maison de plaisance pour nos Roys, comme à la vérité ce lieu où est assis ce Village est des plus agreables de France, planté sur la crouppe d'un costau doucement eslevé, duquel vous descouvrez les beaux valons & parterres plaisants, que la petite riviere d'Estampes (proprement appellée Iuïne) arrose en serpentant iusque dedans Estampes.
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Chastelains, infeodez de Challo S. Mard
Iuïne riviere d'Estampes Coustumes, c'est à dire droict & devoirs que l'on doibt au Roy. Maison d'Euldes le Maire, lieu d'Asile, & de fráchise. Armes d'Euldes le Maire, escartelées des plaines armes de Ierusalé. Chartiers famille descendue dudit Euldes le Maire |
p. 1146
Armes ou devise particuliere des Chartiers
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C'est pourquoy feu mósieur Chartier ancien Conseiller de la Cour estoit recognu pour le Chef de ladite fráchise de Challo sainct Mard, lequel neantmoins portoit des armes particulieres de la maison des Chartiers d'argent à deux oiseaux de sable perchez sur un chicot d'arrbe d'or mis en fesse, ayant au dessous quelques fleurs & rozeaux d'estang ou de riviere, comme on void en la chapelle des Chartiers en l'Eglise de S. André de Laas à Paris. Ce qui doit estre, suivant la Loy des Armes & Blasons, plustot pris pour emblesme, & devise, que pour Armes d'anciennes famille, telle que celle des Chartiers, renommee par tout les endroits du royaume.
Numerabantin dote Triumphos.
Pour esneruer (?) ces anciens Privileges, marques insignes de la devotion de nos Roys, à l'endroit de ceux qui voyageoient au sainct Sepulchre, le malheur de ces dernières guerres, qui ont tout alteré ce grand corps de la Fráce, & tous ses membres en fuitte, avec quelques passions particulières, en ont esté le subiet, couvert d'un pretexte plausible en apparence. Que ces exemptions et Privileges de se debvoient estendre au delà des coustumes qui estoient en usage sous Philippes premier, du temps duquel le nom des tailles, taillons, subsides, & autres impositiós, que la necessite a fait passer en Loy, pour l'étretien du Royaume, estoit incognu, & partant que ceux de la fráchise n'en devoient estre exépts. Que le nóbre de ceux de cette famille espendue par toutes les bónes Villes du Royaume, & nômément les Maritimes & frontieres excedoit vingt ou tréte mille personnes. A ces deux articles principaux il se pourroit respondre, que ce Privilege ayant esté conformé par la plus part de nos Roys successeurs de l'estoc de Philippes premiers sans intermissió, voire dilaté, suivant leur souveraine Puissance, Quidquid Principi placuit, legis habet vxorem. Qaunt au nóbre excessif, notoirement preiudiciable aux droicts du Roy, Móseigneur le Chancelier peut estre acertené par les registres des Requestes de l'Hostel & de ladicte franchise, qu'il n'y a pas deux cents masions qui en soient relevées, & par consequent capables de iouyr des exemptions que l'on met en debat.
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Source : Les Bibliothèques Virtuelles Humanistes (Université de Tours)